Industrie belge : les répliques silencieuses du conflit ukrainien

L’industrie belge à l’épreuve des chocs géopolitiques : constats et mutations Plus de deux ans après le déclenchement du conflit en Ukraine, l’industrie belge continue d’en absorber les chocs indirects. Si les projecteurs médiatiques se sont partiellement détournés de la ligne de front, les conséquences structurelles sur la chaîne de valeur industrielle européenne – et belge en particulier – demeurent tangibles. Approvisionnement, énergie, logistique, stratégie d’achat : tout a été reconfiguré dans un paysage devenu hautement volatile. Retour sur une mutation industrielle en cours, entre vulnérabilités exposées et adaptations stratégiques durables.
30 June 2025 by
Industrie belge : les répliques silencieuses du conflit ukrainien
Maxime JASPERS
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Matières premières : la dépendance en pleine lumière

Avant 2022, l’Ukraine et la Russie formaient des maillons essentiels de l’économie mondiale pour les matières premières. La Russie concentrait une part significative de la production mondiale de nickel, d’aluminium et de cuivre. L’Ukraine, de son côté, exportait du néon (indispensable à la gravure des semi-conducteurs), des aciers spécifiques et certains composants pour la construction.

Dès les premières semaines du conflit, le secteur industriel belge a vu s’accumuler retards, pénuries, renchérissements brutaux. Le BTP, la métallurgie, l’automobile ou encore l’électronique ont dû revoir leurs habitudes d’approvisionnement.

Plus qu’un simple stress passager, c’est un changement de paradigme : l’accès à la matière n’est plus garanti. Il se paie désormais au prix de la diversification, du sourcing européen, voire du stock de précaution.

 Énergie 🔌: un révélateur de vulnérabilité industrielle

La réduction drastique des flux gaziers russes vers l’Europe a propulsé les prix de l’énergie à des niveaux historiques en 2022. En Belgique, les conséquences furent immédiates pour les industriels électro-intensifs (sidérurgie, traitement thermique, verrerie…).

Certaines unités ont temporairement réduit ou arrêté leur activité. D’autres ont choisi de réagir plus structurellement :

  • rénovation énergétique des bâtiments,
  • investissements dans la récupération de chaleur,
  • et montée en puissance de la production décentralisée (photovoltaïque, cogénération).

Un virage énergétique forcé, mais qui pourrait à terme offrir un avantage compétitif aux industriels belges ayant investi tôt dans leur autonomie.

Chaînes d’approvisionnement 🔄 : l’ère du “nearshoring” assumé

Le conflit a mis à nu une dépendance excessive à l’égard de l’Asie pour les composants, les pièces usinées ou les consommables. Si la mondialisation n’est pas remise en cause dans son ensemble, une forme de régionalisation s’installe. Turquie, Europe de l’Est, Maghreb : ces zones montent en puissance comme partenaires privilégiés des industriels belges.

Lomoutil, entreprise de distribution technique implantée à Soumagne, observe une accélération nette des demandes de sourcing européen, en particulier pour les produits sensibles aux tensions (tiges filetées, abrasifs, consommables techniques). Une logique de sécurité d’approvisionnement a remplacé celle de la seule performance prix.

Logistique 🚚 : la fin du “just-in-time” ?

L’instabilité géopolitique s’est doublée d’un désordre logistique global. Fret maritime cher et imprévisible, tension sur les chauffeurs routiers, ralentissements portuaires : autant d’éléments qui ont disqualifié le modèle du stock minimal.

La réponse se dessine en deux axes :

  • renforcement des stocks tampon sur les références critiques,
  • digitalisation accrue des flux pour plus de visibilité en temps réel.

Certaines entreprises, comme Lomoutil, ont internalisé cette logique en sécurisant leurs approvisionnements sur les familles de produits les plus exposées (tiges filetées, abrasifs, outillage spécialisé, ...), anticipant ainsi les besoins de leurs clients industriels.

Vers un nouveau pacte industriel belge ? 📈

Si la guerre a mis à l’épreuve la résilience industrielle belge, elle ouvre aussi des perspectives.

Relocalisation partielle, montée en puissance de l’économie circulaire (recyclage, maintenance prédictive, allongement de la durée de vie des équipements), écosystèmes de production régionaux : une dynamique vertueuse émerge.

Les filières techniques et les distributeurs spécialisés, souvent dans l’ombre, en sont les pivots silencieux. Grâce à leur proximité, leur réactivité et leur connaissance fine des besoins terrain, ils apportent aux industriels les outils pour faire face à l’incertitude sans sacrifier l’efficacité.

Conclusion 🧩 : vers une souveraineté industrielle à échelle humaine

La guerre en Ukraine a révélé une vérité simple mais trop longtemps ignorée : une industrie forte repose autant sur des partenariats solides que sur des approvisionnements fiables. Ce n’est plus uniquement une affaire de macroéconomie, mais de stratégie à échelle humaine.

Dans ce nouveau paysage, les acteurs ancrés localement comme Lomoutil prennent une place essentielle. Leur capacité à anticiper, s’adapter et répondre vite devient un avantage stratégique pour leurs clients. Et peut-être, au fond, le socle d’une nouvelle forme de souveraineté industrielle belge.

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